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Serendipity.

Pour une écologie politique de l’adaptation au changement climatique.

Rudolf, Florence. 2016 (dir.). Les villes à la croisée des stratégies globales et locales des enjeux climatiques. Québec : Presses de l’Université Laval, coll. « Sociologie contemporaine ».

Les changements climatiques et leurs impacts sur les écosystèmes et les sociétés sont aujourd’hui des réalités avec lesquelles toute société doit composer (GIEC 2007) (IPCC 2014). L’accord de Paris sur le climat (2015), les Objectifs pour le Développement Durable (Sustainable Development Goals 2015) ou encore les plans d’adaptation nationaux (le PNACC en France) identifient l’adaptation au changement climatique comme un élément déterminant pour assurer le futur des sociétés. Ce défi est, par ailleurs, rendu complexe par les interactions entre changement du climat et dynamiques sociales à différentes échelles. Parmi les questions liées à la globalisation, l’adaptation au changement climatique est l’une de celles qui sont les plus concernées par une gouvernance globale–locale qui s’écarte des modes de gouvernement classique. Outre le rôle joué par les accords internationaux et l’implication des collectivités locales dans des politiques de protection du climat, cette gouvernance se caractérise par une influence grandissante des acteurs de l’expertise scientifique et technique (GIEC, bureaux d’études, etc.), des coalitions d’intérêts (lobbying économique et énergétique, contre-pouvoirs d’ONG, etc.) et des réseaux transnationaux (Convention des Maires, Alliance Climat, ICLEI et C40). Ces nouveaux acteurs participent dorénavant à infléchir la façon dont la question climatique est saisie et traitée aux différents niveaux de gouvernement (de l’échelle internationale à l’échelle régionale et locale des territoires).

En outre, les villes ou les gouvernements métropolitains jouent un rôle important dans l’atténuation et l’adaptation au changement climatique. Cela renvoie au fait que les villes, et plus particulièrement les grandes villes, sont devenues des échelles clés dans la régulation des grands problèmes contemporains (Brenner 2014). En s’intégrant dans des réseaux d’acteurs transnationaux (Convention des Maires, ICLEI, etc.), elles participent non seulement au renouvellement de la gouvernance climatique, à l’échelle locale [1], mais aussi au renouvellement des manières de penser et d’agir en faveur de l’adaptation au changement climatique. Elles peuvent, à ce titre, devenir un acteur clé de la politisation de cette question, en la rapportant localement aux problèmes de société qu’elle pose.

Certains voient, dans ces évolutions, une avancée notable dans le traitement de la question climatique, puisque des formes de gouvernance incluant des instances de délibération entre le scientifique et le politique, entre les acteurs publics, les intérêts privés et la société civile, seraient vues comme plus à même de répondre à la complexité des enjeux de l’adaptation au changement climatique. D’autres, par contre, considèrent que la gouvernance à l’œuvre tend à privilégier le caractère institutionnel et normatif du traitement de la question climatique, ce qui la technicise et l’éloigne ainsi des préoccupations citoyennes à partir desquelles elle pourrait prendre tout son sens.

Des tensions et des réponses partielles.

Ainsi, les enjeux climatiques mettent en lumière l’existence d’une tension entre l’ouverture des scènes de décision à de multiples acteurs et l’exclusion des préoccupations citoyennes en dépit de l’injonction à la participation. Ce débat a le mérite de poser deux questions essentielles :

– Celle des problématiques à partir desquelles l’adaptation au changement climatique peut être appréhendée comme une question globale qui concerne le devenir de la planète, mais aussi qui touche au plus près les individus qui y sont et seront confrontés.

– Celle de la démocratisation dont peut faire l’objet une telle question, dont la dimension citoyenne apparaît aujourd’hui négligée, alors même qu’elle fait partie, selon nous, du « problème posé » et des réponses à y apporter.

En focalisant l’attention davantage sur la vulnérabilité et la « résilience physique » des territoires aux aléas climatiques (tempêtes, événements environnementaux majeurs, etc.) que sur les inégalités et les possibilités d’adaptation des personnes les plus vulnérables et les plus exposées aux injustices environnementales (Moser 2011), ne risque-t-on pas de sous-estimer les enjeux humains et sociaux de l’adaptation ? Le fait de sous-estimer de tels enjeux ne conduit-il pas à affaiblir la légitimité politique d’une telle question, pour les élus qui s’en saisissent, mais aussi pour les acteurs des territoires susceptibles d’en porter les actions ? Ne risque-t-on pas de passer à côté de formes de mobilisation collective, d’engagement citoyen et associatif, qui pourraient enrichir les manières de penser et d’agir en faveur de l’adaptation au changement climatique ?

Les contributeurs de l’ouvrage répondent partiellement à ces interrogations, mettant en avant la multiplicité des approches liées à l’adaptation au changement climatique, y compris la résilience qui se substitue, aujourd’hui, à la logique du risque et de l’aléa, ainsi que de la mitigation ou de l’atténuation. Les auteur.e.s élaborent des critiques ou des mises à l’épreuve de ce vocable, pensé comme ayant pris le relais « de l’heuristique de la peur, propre à la société du risque ». La résilience inviterait « à se déplacer de l’étude des aléas qui engendrent des catastrophes, au développement d’une intelligence cognitive, fonctionnelle et organisationnelle pour faire face aux situations de crise » (p. 5). Ou encore, plus loin, la résilience serait « la capacité d’un système à absorber une perturbation et à se réorganiser tout en opérant des changements de manière à conserver essentiellement les mêmes fonctions, structure, identité et rétroaction – en d’autres termes, pour rester dans le même bassin d’attraction » (Walker et al. 2004). Elle désignerait, dès lors, l’inverse de la catastrophe, au sens théorique du terme, voire même ce qui, dans un système et son évolution, préviendrait la catastrophe (Pigeon 2012, p. 199).

La résilience, une naturalisation du changement écologique.

La première partie de l’ouvrage, Des sémantiques au service des changements climatiques ?, comprend trois articles, censés introduire la question de la résilience en comparaison avec d’autres vocables, tels la vulnérabilité ou les risques. Le premier article de Didier Taverne, « Réduire les risques, gérer les crises : a-t-on vraiment le choix ? », ouvre sur une critique de la résilience qui naturaliserait les situations de catastrophe et de crise dans un contexte d’extension d’un capitalisme néolibéral. Pensée comme une injonction à l’adaptation permanente sans que cette injonction soit mise en regard avec les capacités des êtres humains et les possibilités qui leur sont offertes, soit les capabilités dont les personnes disposent (Sen 1979) (Nussbaum 2011), la notion de résilience traduirait un désengagement de l’État dans la gestion des affaires publiques. Dès lors, assimilée à une approche décentralisée faisant porter la responsabilité sur les personnes et les acteurs locaux, selon l’auteur, la résilience fait écho à cette acceptation de la catastrophe climatique comme un état de fait qu’aucune politique publique ne parviendrait à enrayer.

Le chapitre suivant, « Risques, danger, vulnérabilité et résilience » de Florence Rudolf, concerne le manque de travaux en sociologie de l’environnement sur la thématique de la résilience qui, centrée sur la réception et la gestion des crises plus que sur la prévention, correspond « à l’ensemble des ressources qui permet de déjouer les coups et de se remettre au plus vite et au milieu de ces derniers » (p. 21). Certes, selon Niklas Luhman, philosophe allemand contemporain inscrit dans une perspective critique du développement contemporain des sociétés, l’incertitude est consubstantielle de toute organisation en société et les règles de vie en société (normes, us et coutumes, etc.) permettent d’organiser les réponses à cette incertitude afin de garantir des constantes sociales. Cependant, à défaut d’égalité dans la promotion de nouvelles normes face aux risques climatiques, en raison du statut de ces faits, l’asymétrie sociale devient la règle dans les débats publics. Engendrant de nouvelles sources d’angoisse, ces futures catastrophes échappent, de par leur nature inédite, à des formes de rationalisation déjà inscrites dans les cultures locales. En ce sens, une culture de la durabilité suppose évidemment de trouver les mots pour le dire et en débattre publiquement. L’objectif de cette acculturation aux transformations environnementales est la politisation, comme l’explique N. Luhman que cite Florence Rudolf (p. 28) : « La politisation consiste à rechercher des responsabilités et à légiférer à leur propos ; elle s’organise autour des asymétries sociales » tandis que « La temporisation consiste à repousser le problème en se préparant à d’éventuelles crises ». Cependant, pour l’auteure, la résilience se situe du second côté. Fondamentalement, au risque suscité par les transformations environnementales, les sociétés répondent en investissant les capacités d’adaptation sans fondamentalement revoir les modèles de développement. Au-delà de ces critiques, la crise écologique, mais aussi la crise « du cadre paradigmatique des sociétés rationnelles et démocratiques » (p. 36) mettent en valeur l’incommensurabilité des cadres experts et des mondes vécus. Or, la résilience manifesterait une autre façon de penser la crise, et mettrait l’accent sur les formes de solidarité sociale, explique Florence Rudolf (p. 41). Cependant, comme le souligne encore l’auteure, la résilience ne doit pas être non plus une façon de repousser la responsabilité de la catastrophe sur des sociétés, des collectivités, des individus supposément non résilients. À penser en termes de système, comme y invite cette terminologie, il est facile d’oublier à quel point la résilience est affaire de sujets, d’individus, d’êtres vivants, d’animaux et de plantes, et même de milieux. En effet, la résilience semble être aujourd’hui essentiellement consacrée aux systèmes techniques et naturels, comme le montrent, d’ailleurs, les articles qui suivent dans la partie consacrée aux études de cas. Béatrice Quenault, dans l’article suivant, intitulé « Rhétorique de la résilience, une lueur d’espoir à l’ère de l’Anthropocène ? Vers un changement de paradigme fondé sur l’acceptation de la catastrophe », met en scène une résilience conçue en termes de cycle adaptatif et de « Panarchie ». La théorie de la « Panarchie » caractérise différents états de stabilité et de désordre, dépendant des systèmes et des dynamiques d’échelle (Gunderson 2002). Ce cadre explicatif permettrait de mieux comprendre comment des systèmes complexes évoluent mais, ce faisant, intègre la résilience des sociétés dans une vision globale qui naturalise le changement écologique. On voit, dès lors, poindre la pensée néolibérale qui naturalise les systèmes sociaux écologiques, loin de toute intervention politique. L’auteure explique également que l’opérationnalisation de la résilience met en scène un affrontement entre une vision systémique et une gestion des risques dans la continuité des solutions mises en œuvre par les collectivités locales au nom du développement durable. Le développement de type ingénieurial et technologique tourne, dès lors, le dos aux questions de solidarité, de développement humain, tout en contribuant à l’accélération des phénomènes de fragmentation sociale.

De l’incertitude en aménagement.

Une deuxième partie, Des sémantiques en action : fabriquer des villes résilientes ?, propose des études de cas aux formats et aux terrains variés. L’article, « Conditions et possibilité d’un urbanisme résiliant en zone inondable. Le cas des Ardoines, en région parisienne » de Laurence Créton–Cazanave, José-Frédéric Deroubaix, Gilles Hubert, Jocelyne Dubois-Maury et Valérie November présente la trajectoire étonnante d’un projet urbain en zone inondable, qui a permis de prendre en considération la résilience comme un paramètre de l’aménagement. L’auteur constate que les procédures habituelles d’aménagement des zones inondables, classées en Plans de Prévention des Risques d’Inondation (PPRI), évacuent les questions de fonctionnement ordinaire du territoire. Or, dans le cas des Ardoines, il semblerait que, par un changement d’acteur et de doctrine, l’aménageur ait décidé de gérer la crise en permettant au maximum le maintien sur place des activités et des acteurs concernés, et non plus en les évacuant. Il s’agissait, dès lors, de donner de la souplesse aux acteurs dans la gestion de la crise. Si l’on compare les aménagements, tels qu’ils sont proposés dans le cadre des PPRI et dans le cadre d’un aménagement résilient, il semblerait que, certes, le projet PPRI protège les biens et les vies, mais il ne facilite pas, voire complique, la gestion de la crise en temps réel, en ne permettant pas le maintien des personnes, même provisoirement, à domicile. L’accessibilité et la souplesse des aménagements, qui s’inscrivent dans le cadre de la résilience, apparaissent comme des atouts majeurs de la prise en compte de cette doctrine au niveau local.

En définitive, l’adoption de cette terminologie inspirée des sciences physiques dépend de l’acception d’une réalité nouvelle : il s’agit de gérer la crise et non pas d’aménager les espaces. L’aménagement des zones inondables contredit, aujourd’hui, l’idée selon laquelle ce seront des personnes qui seront soumises à des crises, éventuellement violentes, et non pas des espaces. L’article, « L’Eurométropole de Strasbourg face aux risques climatiques. Mettre le cap sur la résilience : évolution des programmes de gestion du risque d’inondation à l’échelle d’une métropole », de Boudeffa Abderrahmane Mehdi, montre, certes, que l’investissement dans des aménagements résilients, lié au changement de paradigme initié par la communauté urbaine de Strasbourg, fait évoluer le rapport des populations aux inondations. Cependant, ce mode d’aménagement et de développement urbain ne s’applique, en réalité, qu’à une partie du territoire inondable. La ville de Rio de Janeiro prend peu en compte l’adaptation au changement climatique, en dépit des vulnérabilités nombreuses des espaces urbains, comme l’écrivent Ana Lucia Britto et Maria Fernanda Lomes dans l’article, « Changements climatiques, adaptation et aménagement urbain à Rio de Janeiro ». Rio ne dispose pas encore de plan d’adaptation, se limitant à définir les champs d’action prioritaires pour renforcer la résilience de la ville. Dans ce contexte, disent les auteures, la prise en compte de l’adaptation engagerait « des politiques, des programmes, des modes de gestion et de régulation ainsi que des investissements qui permettraient de pointer les valeurs qui creusent les inégalités et contribuent à la perpétuation d’une relation insoutenable à l’égard de l’environnement » (p. 156).

L’article de Didier Taverne, « Les outils de la planification urbaine à l’épreuve des changements climatiques », présente des politiques d’adaptation conçues dans la continuité des politiques de mitigation, elles-mêmes pensées dans la foulée du développement durable. Ces politiques de réduction de la consommation énergétique participent, notamment, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et participent d’une réduction des risques, notamment à l’échelle planétaire. Elles contribuent, éventuellement, à une plus grande capacité d’adaptation à l’échelle locale. Cependant, elles concernent peu la manière dont les populations elles-mêmes auront à s’adapter face à des changements climatiques d’importance variable. Les logiques territoriales locales sont peu prises en considération. La relocalisation des politiques climatiques va de pair avec un intense recyclage des mots d’action et des modes d’action précédemment utilisés dans le contexte du développement durable ou de la réduction des risques. Cependant, la perspective ouverte par les effets des changements climatiques est très différente. Une politique de mitigation par exemple, un usage raisonné des ressources, permettrait, certes, de limiter les émissions de gaz à effet de serre et de garder une certaine maîtrise sur l’avenir, alors que les êtres humains seront sommés de modifier leurs pratiques. Cependant, il semble, explique l’auteur, que les acteurs doivent d’abord se rendre compte que l’ère de la maîtrise est finie et qu’il s’agit de faire face, à présent et dans le futur, à des changements imprévisibles. Si, dans le cas de l’aménagement, l’être humain est doté de la capacité de savoir maîtriser son environnement, dans le cas de l’adaptation, il doit agir avec prudence, puisqu’il ne peut connaître toutes les chaînes de conséquences auxquelles son action l’expose.

Vers une culture durable.

La troisième partie, Quelle place pour la sémantique de la culture du risque ?, reprend l’idée de transformations culturelles vis-à-vis de l’adaptation au changement climatique, et se décline en quatre chapitres. « Quelles médiations pour quelles cultures du risque ? », de Florence Rudolf et Didier Taverne, défend l’idée qu’il s’agit de former un environnement, une ambiance, un milieu propice à la production, la reproduction, d’une culture du risque (p. 264). L’article « Le principe de prévention à l’épreuve des cultures locales du risque d’inondations », de Séverine Durand et de Richard-Ferroudji Audrey, interroge la forme possible de relocalisation des politiques publiques de gestion des risques, dans deux quartiers de la ville de Béziers, et met en évidence leurs trajectoires contrastées à partir d’une même politique publique. « Une culture sensible de l’environnement en zone inondable », de Charline Daud, présente des politiques de risques qui intègrent la question des cultures locales, prenant en compte les possibles défaillances des systèmes techniques en matière de prévention et, par voie de conséquence, la vulnérabilité des biens et des personnes.

« L’attention est donc portée sur une culture du risque dans la pédagogie, la mémoire afin de renforcer la résilience des territoires. Cependant, les réponses mises en place par les différents acteurs, dont les porteurs de projets artistiques, ne sont pas pleinement satisfaisantes. Elles ne permettent pas réellement d’intégrer le risque dans le quotidien. Ces manifestations demeurent des représentations, des mises en scène de dommages potentiels. (…) C’est ainsi que la culture sensible de l’environnement en zone inondable apparaît comme une nouvelle manière de questionner les territoires à risque en introduisant l’aspect mouvant et changeant dans le bâti. L’idée étant de ne pas chercher à coloniser les zones inondables, source de biodiversité, mais au contraire de promouvoir les potentiels de l’inondabilité d’un territoire urbanisé. » (p. 304-305).

« La ville face au changement climatique : vers une nouvelle symbolique urbaine ? », de Geoffrey Carrère, dénonce le fait que les aménagements durables, tout en prenant en compte les préoccupations écologiques, ne remettent pas en cause les principes de l’économie de marché, pourtant profondément destructrice. Ainsi, les aménagements urbains durables apparaissent au cœur d’un paradoxe idéologique. En ayant recours à la notion d’écologie, tout en ayant systématisé l’instruction délibérative publique, ces aménagements ont mis au cœur la logique de l’intérêt commun, tout en limitant la portée réformatrice de cette idéologie. Selon Louis Guay, auteur de la conclusion « La controverse sociale sur les changements climatiques », étudier les problèmes d’environnement sous l’angle de la controverse sociale est une des manières de pratiquer la sociologie de l’environnement. Cette approche, que l’on peut taxer de constructivisme écologique, montre la grande diversité des manières de se représenter un problème écologique. « La controverse est souvent le passage obligé pour la prise de décision commune sur des enjeux complexes touchant plusieurs domaines de pratique de conduite sociale et un grand nombre d’organisations sociales » (p. 352). Cet article, à mettre en perspective avec celui de Florence Rudolf introduisant l’ouvrage, montre que la résilience n’est finalement qu’une des nouvelles perspectives d’action en matière de lutte contre le changement climatique, entre atténuation et adaptation.

Une notion à mi-chemin.

Au final, l’ensemble de l’ouvrage, fort documenté, avec des contributions très diverses, semble, cependant, à mi-chemin de ce que pourrait être une véritable synthèse en la matière. Il est difficile de séparer dans ce jugement, par ailleurs, ce qui tient du fond de la problématique d’une part, de la mise en forme de l’ouvrage d’autre part. En effet, la question de la résilience, centrale aujourd’hui dans ce domaine des transformations écologiques, à la fois par son importance et sa diffusion auprès des institutions internationales, mais aussi par les critiques nombreuses qui lui sont adressées, tant celles venant de l’écologie politique que celles adressées à son manque de caractère opératoire, est largement encore au milieu du gué. Et peut-être ne sera-t-elle jamais véritablement prise en considération par les politiques publiques locales. Les villes ou les collectivités territoriales ont du mal, et on les comprend, vu les pressions qui pèsent sur les territoires, tant en matière de fiscalité que d’importance des enjeux de transformation écologique et sociétale, à faire face à ce nouveau vocable qui dérange la manière que les outils de l’aménagement ont de configurer leur action dans le rapport au temps présent. En effet, l’inertie des cadres d’action de l’aménagement produit véritablement une difficulté à prendre en charge un vocable qui en appelle à l’incertitude et à l’instabilité en matière de connaissances quant aux transformations en cours. Les scientifiques ne savent pas ce qu’il va en être du futur, et encore moins dans les cinquante années à venir, là où l’aménagement produit de la stabilité pour les décennies à venir. Ainsi, le vocable de résilience introduit l’idée de flexibilité des aménagements, ce qui est peu compatible, encore aujourd’hui, avec les cadres de pensée de la production urbaine. Enfin, la résilience correspond plus largement à une pensée des systèmes naturels et sociaux, qui exclut les perspectives d’apprentissage individuel et collectif, ainsi que l’idée de trajectoires d’adaptation, c’est-à-dire d’une temporalité en la matière. Jusqu’à présent, les décideurs – et la littérature scientifique – se sont concentrés essentiellement sur la préservation des systèmes techniques (réseaux divers) et des espaces construits et habités, ou encore sur la protection des populations “vulnérables” aux impacts du changement climatique. Cette conception de l’adaptation a conduit à proposer des solutions allant dans le sens d’une ingénierie des territoires, sans avancer suffisamment dans la compréhension des modalités d’adaptation des populations, afin d’assurer la préservation des écosystèmes et des conditions de vie des différents segments de la société, à court et à long terme (Leach et al. 2010). À l’inverse, la notion de trajectoire d’adaptation propose de concevoir l’adaptation comme une combinaison d’actions, individuelles et collectives, qui s’inscrit dans une perspective de renouvellement des dynamiques socio-environnementales, par le biais de la mobilisation de capacités « adaptatives ». Dans un contexte d’incertitude profonde et de conflits, l’objectif est de faire émerger et de mobiliser conjointement des potentialités écologiques et sociales.

Abstract

In the face of climate change and its impacts, societies have developed a series of operational tools and concepts that have allowed them to take account of the evolution of this issue. Beginning in 2010, resilience partially replaced the logic of risk and hazard, as well as the one of mitigation. The coordinators of the book try, in three parts, to understand how the issue of resilience really allows to take into account the realities of adaptation to climate change in the territories, conceptually, operationally and culturally.

Bibliography

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Notes

[1] En initiant de nouvelles démarches climat (plus participatives, prospectives, intégratrices des acteurs du territoire, etc.).

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Serendipity.

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