Le projet annoncé du film de Jacques Tarnero et Philippe Bensoussan, est de dénoncer les médias français lorsqu’ils traitent l’information concernant Israël, considérée comme systématiquement défavorable à cet État.
Pour ce faire, deux exemples phares mettant en cause ceux-ci, sont présentés. Tout d’abord la photo publiée à la une de Libération d’un « soldat israélien menaçant un jeune palestinien ensanglanté », alors qu’il s’agissait en fait d’un soldat protégeant d’un lynchage un étudiant juif américain ; le second cas a trait à une modification dans un sens provocateur du titre de la dépêche de l’Agence France Presse annonçant à tort « le percement d’un tunnel sous l’esplanade des mosquées à Jérusalem ».
A ces deux cas, s’ajoutent les non-dits des médias, mis en lumière par des fragments d’actualités inédites des chaînes arabes présentant des discours agressifs d’Arafat et des séquences d’endoctrinement mettant en scène des enfants conditionnés depuis leur jeune âge à devenir des kamikazes.
Plutôt que de replacer ces faits dans le contexte de tension généralisée qui règne dans la région et de mener de véritables investigations sur ces faits méritant réflexion afin d’en comprendre la nature, nous sont présentés de multiples clips, entrecoupés de longs commentaires qui ne sont rien d’autre que l’image en miroir de ce que l’on prétend dénoncer. Parmi les intervenants, on retrouve à maintes reprises Alain Finkielkraut et ses diatribes bien connues, ou encore Alexandre Adler offusqué que l’on puisse faire un quelconque parallèle avec une situation coloniale, Israël n’ayant pas été soutenu par un Grand Arrière. Autre intervention, celle d’une femme colon justifiant sa présence dans les territoires au nom du « cadastre biblique ».
En définitive, les discours occupent la majeure partie du film et dérapent de plus en plus vers l’idéologie. Si E. Barak et J. Rubin sont longuement entendus, reprenant à l’envi les arguments sur la générosité prétendue des offres de Taba, rien ne sera dit des deux années qui ont précédé, marquées par l’immobilisme du Premier ministre et la multiplication des colonies, non plus que sur le contexte immédiat d’élections imminentes déjà gagnées par Sharon. Aucun autre négociateur américain, ni a fortiori palestinien n’est sollicité, alors que des interprétations fort différentes des rencontres ont été émises.
Au total, le film n’aboutit qu’à renforcer le sentiment d’enfermement et d’incompréhension d’une communauté qui pourtant s’interroge à juste titre. Aucune clé pour comprendre la nature du conflit israélo-palestinien n’est évoquée, ni pour interpréter la situation autrement qu’à la lumière d’un antisémitisme généralisé.
Décryptage, documentaire français de Jacques Tarnero et Philippe Benoussan, 2003. 1 heure 40.