Rédigé par un collectif de consultants dirigé par Dominique Thierry et Pierre-Olivier Archer, cet ouvrage incite à ne pas confondre « réponse » et « solution » en matière d’emploi, tant la diversité des modes de « gestion locale de l’emploi » (gle) apparaît grande au travers des expériences relatées. Il n’y a donc que « des » réponses s’appuyant d’abord sur un ensemble de stratégies, développées dans la première partie, et de méthodes, évoquées dans la seconde. La première des stratégies proposées est de considérer que « la gestion locale de l’emploi » est tout aussi autonome qu’efficace. En effet, bien distinguer celle-ci qui vise l’accompagnement des publics « fragiles » vers l’emploi, du « développement économique local », tourné vers la prospection externe et la création d’entreprises, permet de mettre en place des outils spécifiques à chacune de ces activités. En revanche, et c’est la seconde stratégie, il convient de les articuler entre elles parce que c’est la condition de l’efficacité véritable de la gle. Pour les auteurs en effet, celle-ci a un meilleur rendement aujourd’hui en raison du retournement de conjoncture — qu’il faut souhaiter durable —, qui favorise la création d’emplois, mais à « rendements décroissants » à mesure que la baisse du chômage se rapproche des publics durablement éloignés de l’emploi, les travailleurs âgés, les femmes et les jeunes les moins qualifiés, qui constituent le « noyau dur » du chômage. Dès lors il faut rendre plus efficace ce nouveau flux de création d’emplois et pour cela « structurer durablement le fonctionnement du marché du travail, en particulier sa composante locale », au profit de ceux qui en ont le plus besoin. Pour le collectif d’auteurs en effet, « c’est au niveau local désormais que peut se faire la différence dans la mise en œuvre des politiques d’emploi », parce que le « noyau dur » évoqué est constitué par ceux qui sont aussi les plus dépendants de l’offre locale et donc les plus susceptibles de tirer parti des « actions qui sont conduites sur leur propre territoire », en vue de la constitution d’une « employabilité locale durable ». Dans cette perspective, tous les acteurs locaux ont un rôle à jouer. Le service public de l’emploi (Spe), n’est plus ainsi, ou ne devrait plus être, un monopole de l’État et de ses services déconcentrés et ce pour au moins deux raisons. En premier lieu, parce qu’une grande partie du public cible lui échappe. Les auteurs rappellent par exemple que l’anpe ne détient que 30 à 40% des offres d’emploi. En second lieu parce que sa « contestabilité » serait favorable au public concerné car « un opérateur en situation de monopole peut être conduit à remettre en cause ses pratiques sous la menace potentielle de la concurrence ».
Quel « bon échelon » pour l’emploi ?
À cet égard les « réponses locales » à la gestion « positive » des situations de précarité d’emploi, développées dans l’ouvrage, constituent un vivier original de « solutions » faiblement alimenté par le spe traditionnel. Ainsi la gle, ici décentralisée, serait globalement vertueuse pour un service public auquel elle a vocation à s’intégrer, mais pas forcément sur le seul registre de la concurrence. Dans la deuxième partie de l’ouvrage consacrée au « pilotage » des politiques d’emploi, les auteurs insistent en effet sur la nécessaire « mise en cohérence » des dispositifs territorialisés, mais pour rappeler la diversité des réponses apportées sur le terrain à un problème qu’ils qualifient eux-mêmes de « serpent de mer ». C’est sans doute là que le registre change. Autant les auteurs s’engagent de manière convaincante sur la nécessité d’une « gestion locale de l’emploi », autant ils ne prennent pas ici parti sur le « bon échelon » auquel celle-ci doit être conduite, même si le développement de l’intercommunalité leur semble orienter le débat dans la bonne direction. L’important est alors selon eux, compte tenu de la diversité des situations, de « bien identifier les niveaux où vont se réaliser les différentes fonctions de la mise en œuvre des politiques locales ». Tout est affaire ici de diagnostic et de coordination. Le « local » est bien ainsi une « réponse » clairement développée par l’ouvrage en matière d’emploi. Celui-ci légitime cependant toutes les « réponses locales », dès lors qu’elles sont efficaces. Mais n’est-ce pas là leur principale vertu ?