La réflexion sur l’art estaujourd’hui florissante, affirme le numéro de juin-juilllet 2001 de la revue Critique. Et il le démontre, à travers onze articles qui commentent et discutent seize ouvrages récents. Son titre, Rouvrir l’art, est significatif. Rouvrir l’art, c’est remettre dans le champ des questions à poser le statut et l’essence de l’art, c’est « déverrouiller » (p. 472) la question des rapports entre l’art et la nature. C’est repenser des notions (le rythme ou le paysage, inspectés selon de nouveaux angles), réinventer des concepts (la plasticité), ou plus modestement mais non moins fructueusement, s’attacher à élargir et enrichir des approches préexistantes.
Un panorama des tendances.
Rouvrir l’art présente une partie des courants philosophiques et/ou esthétiques qui ont cours en France aujourd’hui, et qui sont parfois fort divergents. Le dernier article du volume est à ce sujet le plus éclairant.
R. Rochlitz [1] expose la situation de l’esthétique philosophique en France, depuis le tournant qu’elle a connu dans les années 1980-1990, avec l’avènement de l’esthétique analytique [2] qui n’attend plus de l’art qu’il apporte une révélation exceptionnelle contre la « pensée dominante », mais qui tend à explorer l’art et l’esthétique par le biais de la connaissance, logique ou empirique, pour mettre un terme à la confusion entre esthétique et critique, en particulier critique socio-politique.
R. Rochlitz commence par un « rejet » de ce tournant analytique : il résume (p. 567) les thèses de D. Chateau, avant de les réfuter. Il critique notamment le caractère « circulaire » de la thèse de la rationnalité de l’art : « à quelle aune mesurer cette rationnalité si l’Art gère lui-même sa rationnalité en se déclarant rationnel ? » ; il déplore l’absence de réponse à cette question chez D. Chateau [3]. Puis R. Rochlitz passe au « premier bilan » (p. 569) du renouvellement apporté par l’esthétique analytique, dressé – ce n’est pas fortuit – par trois des principaux traducteurs de N. Goodman : J.-P. Cometti, J. Morizot, R. Pouivet. Mais à la différence de Goodman (qui n’est pas leur seule source d’inspiration, et qui est souvent contesté), ils cherchent à écrire un livre « d’esthétique », qui se distingue par son caractère non polémique : l’esthétique analytique n’a plus à batailler, elle a su se rendre indispensable.
Juste avant, E. During [4] présente la « philosophie de l’esthétique » de J. Rancière, en explicitant les deux emplois que ce dernier fait du terme « esthétique » (p. 559 et p. 560), et en résumant ainsi sa proposition (p. 563) : « une histoire des régimes de pensée des arts qui ne se confond ni avec l’histoire de l’art, ni avec la philosophie de l’art, et qui à défaut d’une confrontation directe avec le champ des questions esthétiques contemporaines, a déjà commencé à indiquer en creux quelques unes de celles qui ne pourront plus se poser. » Plus haut, J.-O. Bégot [5] s’intéresse à la Kunstwissenschaft, la « science de l’art », qu’un dossier de La part de l’Œil fait découvrir plus amplement au public francophone, dossier qui s’impose désormais comme un précieux instrument de travail et comme une référence indispensable (p. 506).
En exergue, une citation de Panofsky à propos de l’inteprétation de Jérôme Bosch, qui s’achève par ces mots : « Nous avons pu percer quelques trous dans la porte d’une chambre close, mais nous n’en avons pas trouvé la clef. » L’aveu d’impuissance de Panofsky a valeur de modèle. Carl Einstein parle même de « l’abîme infranchissable qui sépare la parole de l’image » [6]. Jeter un pont sur cet abîme est le problème crucial de toute discipline cherchant à produire un savoir des images, et surtout de la Kunstwissenschaft.
Le numéro double de La Part de l’Œil veut faire le point sur les principaux problèmes de la discipline, en remettant en perspective les textes fondateurs (Winckelman qui veut déterminer l’essence de l’art, avec une approche inséparablement historique et théorique ; Wölflin, qui reprend cette approche ; mais E. Escoubas pense que le traitement systématique de l’histoire de l’art de Wölflin ne fait pas à proprement parler une « science de l’art », dont le modèle serait plutôt à chercher dans L’Esthétique de Hegel [7]) tout en faisant place aux développements les plus récents.
« L’alternative formalisme-iconologie » qu’incarnent respectivement Wölflin et Panofsky [8] peut caractériser la Kunstwissenschaft et éclairer les nombreux débats qui en marquent l’histoire. Ces deux approches sont cependant complémentaires, ainsi que l’étude de D. Cohn le fait ressortir. Donner tous les éléments nécessaires pour mieux poser ce difficile problème de la Kunstwissenschaft, tel n’est pas le moindre des mérites de ce riche dossier, conclut J.-O. Bégot (p. 506). Quant à J.-P. Carron [9], qui insiste sur la pré-individualité, idée majeure de la méditation philosophique et esthétique de J. Garelli depuis 1966, il tombe malheureusement dans le travers de la phénoménologie, dont le vocubulaire est « parfois contesté pour sa trop grande technicité » [10]. L’ouvrage de J. Garelli atteint un « degré de complexité et de radicalité […] jamais atteint » dans le dialogue avec les grands textes husserliens (p. 551). L’article de J.-P. Carron, lui, est réservé aux initiés à la phénoménologie.
Nouveaux concepts, nouveaux objets et pluridisciplinarité.
Les références à Hegel sont, bien sûr, nombreuses au fil de ces pages ; on l’a vu pour la Kunstwissenschaft. On les retrouve aussi dans des démarches plus nouvelles que celles qui viennent d’être exposées : soit en s’en démarquant, comme l’approche scientifico-théorique de J.-M. Besse, qui prend le contre-pied de la thèse moderniste de l’autonomie esthétique (O. Schefer, p. 474). Soit en proposant de lui donner un avenir, au-delà de la clôture de la fin de l’histoire, grâce au concept de plasticité qui, selon C. Malabou, est un concept clé du hégélianisme (M. Alizart, p. 542)
En rendant compte de Plasticité, qui rassemble les actes du colloque tenu au Fresnoy en 1999 à l’instigation de C. Malabou, pou « répondre au désir insistant de la plasticité d’accéder au concept » (p. 542), M. Alizart [11] s’interroge sur »une infime variation de vocabulaire » (p. 540 et p. 550), la fortune du petit mot de « plastique » qui, comme la matière qu’il désigne (aussi), a envahi notre univers quotidien.
Plus que l’effet d’une mode, M. Alizart y voit l’apparition d’un de ces « concepts-souche qui caractérisent les grandes époques de la pensée », comme « structure » au 19e siècle, ou « analyse » dans la philosophie des Lumières (p. 542). Sa réapparition dans le vocabulaire de l’esthétique ne peut que traduire un réel changement dans nos manières d’appréhender l’art, et le monde. Mais lesquels ?
M. Alizart félicite l’intention des penseurs cités p. 543-4 d’extraire la pensée de l’enlisement postmoderne et de définir les conditions d’un nouveau régime du nouveau pour l’art. Aucun philosophe, écrit-il, n’avait depuis longtemps osé embrasser ainsi l’ensemble du monde contemporain, ni de cette manière, en bousculant à ce point la tradition philosophique. La diversité des domaines des intervenants (art, philosophie, science, ingéniérie des nouveaux matériaux, etc. etc.) est mise en avant.
Cependant, c’est avec les contributions sur l’art que le livre prend sa pleine dimension. Tous les auteurs (p. 547), évoquant la manière dont la plasticité inspire leur réflexion ou leur travail montrent à quel point le concept est fécond dès qu’on le pense à la lumière de l’art, surtout de l’art contemporain. Pour les œuvres apparues dans les années 1960, qui n’appartiennent ni à la peinture, ni à la sculpture, ni peut-être même aux « beaux-art », qui sont de l’art, mais rien de connu dans l’art, et dont les qualificatifs « d’installation », de « performance » ne suffisent pas à dire l’inspiration commune, il a bien fallu trouver un nom (p. 547-548). « Plasticien » versus « artiste », « arts plastiques » versus « beaux-arts », pour dire non seulement une nouvelle technique artistique, mais un nouveau régime de l’œuvre d’art, et jusqu’à une nouvelle époque de la métaphysique, une nouvelle manière d’être au monde, à la pensée, un nouveau mode de rapport aux choses et au temps. (p. 549-550).
L’ambition du livre et de la démarche, soulignée avec admiration par M. Alizart, ne frôle-t-elle pas toutefois l’orgueil de notre époque vis-à-vis d’elle-même ? Le concept de « plasticité », peut-on lire p. 549, « conduit l’histoire de l’art à se réécrire tout entière à partir de la coupure entre son moment moderne, « plastique », et son moment « non plastique », c’est-à-dire rien moins que tout l’art passé »…
Non plus nouveau concept, mais « nouvel objet dont la philosophie peut s’emparer avec profit » (p. 530), le rythme est le thème de la riche étude P. Sauvanet, là encore caractérisée par la transversalité : la science y tient une grande place à côté de l’esthétique. C. Duflo [12] explicite la démarche de P. Sauvanet en faisant l’éloge de sa grande rigueur. La pensée du rythme doit passer par un travail de distinction entre rythmes « naturel » et rythmes culturels (p. 533). Vient ensuite une étape indispensable, caractériser le rythme par ce qu’il n’est pas (le rythme n’a pas d’essence, comment l’aborder ?), mais étape non suffisante en soi. Enfin, le lourd et courageux travail définitionnel [13] , suivi de la réflexion sur ce qu’on peut et ce qu’on doit attendre d’une telle définition (p. 535). P. Sauvanet ne donne pas de définition génétique du rythme, mais en dégage trois critères de reconnaissance : la structure, la périodicité et le mouvement, dont au moins deux doivent être présents pour qu’il y ait rythme. (I, 195, cité p. 536). Ce travail définitionnel a deux effets. 1. Il nous libère des mauvaises généralisations, les « fausses routes » (p. 532) de la démarche originaire (l’illusion qu’il suffit pour rendre compte de quelque chose de lui assigner une origine) et du panrythmisme, qui fait voir du rythme partout. 2. Il nous sauve aussi de l’effet inverse, le renoncement à penser, la peureuse logorrhée de l’ineffable et du sans concept (p. 537).
Le travail de P. Sauvanet nous donne aussi la possibilité de lectures fécondes des rythmes esthétiques (C. Duflo cite rapidement trois exemples donnés par P. Sauvanet, notamment des pages « remarquables » sur Klee), et la possibilité d’une éthique du rythme, qui permettrait d’échapper par le rythme à l’emprise du mètre (la métrification des existences repérée par Foucault), contraire à l’eurythmie de la vie (p. 539)
L’homme, l’art, la nature et le temps.
Autre approche « à la croisée des chemins », celle de J.-M. Besse et de J.-L. Brisson commentée par O. Schefer [14], et qui nous amène à regarder le paysage par l’esthétique et la géographie de l’espace. Les deux études présentées ici interrogent les rapports entre l’homme et la nature. La question de l’art n’est pas leur principal obejt, mais cette question pourrait prendre un sens nouveau en redécouvrant le dialogue avec la nature, en « déverrouillant » la question des rapports entre l’art et la nature qu’on croyait évacuée de la modernité depuis Hegel. O. Schefer, après avoir résolument critiqué la théorie de l’artialisation d’A. Roger (p. 469 sq), montre que les deux essais qu’il commente permettent de concevoir l’expérience subjective de la nature sur un mode non nostalgique et non mystificateur, que la relation entre art et nature est à penser en termes d’échanges et de co-appartenance, voire de déplacements infinis (p. 473). O. Schefer s’intéresse à l’étude que fait J.-M. Besse des Grands paysages de Bruegel [15], où le paysage est à la fois objet de contemplation vu de loin, de l’extérieur, et espace vécu et animé de l’intérieur, ainsi qu’au Land Art, qui confirme cette approche « ouverte » d’un paysage conçu en termes d’expérience et non plus de représentation subjective ou d’objectivité (p. 479). O. Schefer fait entre autres référence à l’ouvrage de A.-F. Penders qui fait l’objet, avec G. Tiberghien, du premier article de la revue, signé par J.-P. Cometti [16].
Avec une approche goodmanienne, J.-P. Cometti commence par poser la question des lieux de l’art, mais dépasse cette démarche en revenant aussi à la question du statut de l’œuvre d’art, à travers le Land Art, pratique artistique qui renouvelle la question cruciale des rapports de l’extérieur et de l’intérieur, parce qu’il problématise les limites qu’on a coutume d’associer au concept même d’œuvre. Ainsi que le note A.-F. Penders [17], les réflexions des artistes (notamment de Robert Morris) sur l’intérieur et l’extérieur amènent à la notion de passage et de déplacement, ce dernier devenant une composante majeure d’œuvres marquées par un changement d’échelle, comme les murs dans le désert [18]. L’art et le paysage y naissent à de nouveaux rapports. Et Cometti propose (p. 461) le « bel éclairage » donné par le petit livre de Notes de G. Tiberghien, qui fait remonter ces interrogations sur l’intériorité et l’extériorité à Jack Kerouac, et plus haut, à Thoreau, et jusqu’au fond plus lointain de l’Amérique indienne. Le titre de l’article de Cometti, « l’ensauvagement de l’art », reprend le mot de P.-Y. Pétillon sur « l’ensauvagement » de Thoreau [19], son expérience de la frontière, qui participent de près à l’identité américaine [20].
Le déplacement, si présent au long de ces deux articles, implique une dimension temporelle de l’espace [21]. Or c’est dans la dimension temporelle (inhérente au thème de l’Annonciation, à la Madonna del Parto et plus généralement à Piero della Francesca) que B.-N. Aboudrar [22] trouve le fil conducteur qui l’incite à rassembler dans la même étude D. Arasse, H. Damisch et Piero della Francesca. L’intérêt de l’article est de montrer, dans le champ commun aux deux auteurs modernes, que ce n’est pas la même histoire de l’art qu’ils y produisent (p. 484). Tous deux font, avec révérence [23], référence à Panofsky, et l’article s’attache à la comparaison de leur critique respective du passage que ce dernier consacre à l’Annonciation de Lorenzetti [24] pour décrire la différence des trois approches.
La temporalité de l’histoire est « successive et progressive » chez E. Panofsky (avec des œuvre-étapes convergeant vers une œuvre seuil contenant elle-même l’avenir de la peinture), « contenue dans l’ici et le maintenant du moment » chez D. Arasse (qui privilégie la corrélation sur l’évolution, et propose une histoire qui se déroulerait en plusieurs foyers), tandis que chez H. Damisch, elle est comme involutée, progressant vers une origine toujours reculée (d’où l’emploi caractéristique du futur antérieur par l’auteur qui considère l’événement en fonction des événements successifs qu’il a engendrés et qui l’ont modifié en retour). »Involutée », un mot emprunté à H. Damisch lui-même, qui s’en sert pour décrire la singulière construction perspective de la Madonna del Parto de Piero della Francesca, « une figure toute d’ouverture, et qui exclut jusqu’à la possibilité d’un « dehors », une figure […] n’ouvrant sur rien d’autre que son propre intérieur. » [25] Une autre caractéristique des raisonnements de H. Damisch, l’ajustement (une réduction et une concession), compléte la présentation de cet auteur.
De l’art et de l’usage de l’art.
Un autre hommage respectueux, non exempt cependant d’un regard critique (signe d’un rapport fécond entre maître et élèves qui « rouvrent » des axes de recherche) est rendu par A. Compagnon [26] à F. Haskell à propos de l’ouvrage posthume de ce dernier. Ce livre « désiré plusieurs années » avant sa parution, interroge les usages sociaux et – notre époque oblige – la consommation de l’art dans les expositions temporaires. La note dominante en est un scepticisme désabusé, fait de méfiance pour la mode de la super-exposition aux motifs nationalistes et commerciaux inavouables. L’ouvrage vient combler une lacune déplorée avec étonnement par A. Compagnon, mais l’émotion que l’on sent dans ses lignes n’empêche pas ce dernier de regretter, outre l’inachèvement du livre, que F. Haskell s’attache peut-être trop longuement aux antécédents du musée plus que de l’exposition temporaire, même s’il reconnaît que les genèses de ces deux institutions sont peu isolables (p. 523). Il regrette surtout (car le sujet lui est cher) la brièveté du chapitre sur les expositions des années 1900 où se rendit Proust. Cependant, si ce livre « n’a pas l’ampleur ni la profondeur de ses grands classiques » (p. 528), son sujet s’imposait. F. Haskell n’a eu que le temps d’en esquisser le traitement complet à travers une série d’aperçus. Un appel à « rouvrir » le sujet ?
Avec La Pornographie, dont P. Dagen [27] donne le compte-rendu, A. Fleischer ne veut pas faire de sociologie (il ne s’intéresse par exemple pas aux modes de production ni de consommation des images pornographiques), mais il ne situe pas non plus la photographie sur le registre de l’art. Ce qui manque sans doute le plus à son essai est l’absence de questionnement sur le statut de la photographie comme œuvre d’art, et sa tentative de révéler l’essence obscène de la photographie (p. 512) en perd peut-être de sa force. Cependant, l’intérêt essentiel du livre réside dans ce que la photographie y est définie crûment en termes de pouvoir (p. 511). Un essai bref, modeste, empirique, c’est, nous dit P. Dagen (p. 507), le propre de la critique en matière de photographie, toujours personnelle, qui n’a suscité que peu d’écrits analytiques, et jamais de querelles théoriques.
La question de l’utilisation de l’art est l’un des points où se révèlent les divergences dans la pensée contemporaine sur l’art. Pour A. Fleischer, l’image [28] n’existe que comme marchandise (p. 516), tandis que pour J.-P. Cometti qui s’interroge sur son statut, l’œuvre d’art est aussi un bien marchand (p. 453). D’autre part même Goodman admet que quelle que soit son utilisation, une œuvre reste ce qu’elle est (p. 456) [29], tandis qu’A. Fleischer ne veut pas de la « distinction commode » entre la pornographie « intrinsèque » de la photo et l’obscénité de ses usages (p. 512). Quant à l’ambition de Plasticité (auquel A. Fleischer a participé), c’est de « montrer que si la plasticité s’incarne et se manifeste dans notre monde, c’est en mettant fin [entre autres] à la césure entre la substance et la fonction » (p. 545)
« L’idée fixe » et univoque d’A. Fleischer contraste avec l’ambition de projets tels que la définition de la plasticité, du rythme, du paysage, avec la démarche pluridisciplinaire de ces projets, et encore avec l’écriture »polyphonique » (dont R. Rochlitz souligne l’originalité) de J.-P. Cometti, J. Morizot et R. Pouivet dans Question d’esthétique. Les différents chapitres de ce livre sur la question de ce qu’est une œuvre d’art [30] révèlent la pluralité des approches proposées, même si les positions des trois auteurs, sans être homogènes, sont assez convergentes pour autoriser un effacement des signatures. La polyphonie : une harmonie à plusieurs voix qui ne disent pas toutes la même chose.
Il est d’ailleurs très intéressant que le recueil s’achève avec l’étude d’un ouvrage dont est co-auteur J.-P. Cometti, qui signe le premier article. Cela permet de mettre en perspective une étude du Land Art par un tenant de l’esthétique analytique et la présentation de cette dernière par R. Rochlitz.
Ce numéro de Critique n’en est pas pour autant « involuté », il n’ouvre pas que sur lui-même, bien au contraire. Ainsi que nous en avertit la préface, il ne prétend pas épuiser, encore moins unifier les manifestations du renouveau actuel de la pensée sur l’art. Il parle à plusieurs voix qui ne sont pas toujours en harmonie les unes avec les autres, mais qui toutes nous donnent envie d’aller plus loin, d’ouvrir, ou de rouvrir, d’autres ouvrages.