De janvier 2012 à octobre 2015, l’Unité Mixte de Recherche CNRS 6590 « Espaces et Sociétés » (ESO), le Centre d’Études et de Recherches sur les Qualifications (CEREQ) accompagné de la Plateforme Universitaire des Données de Caen (PUDC), le Groupement d’Intérêt Scientifique Môle Armoricain de Recherche sur la SOciété de l’Information et les Usages d’INternet (M@rsouin), le Centre de Recherche sur l’Éducation les Apprentissages et la Didactique (CREAD) et le Pôle Régional de Recherche et d’Étude pour la Formation et l’Action Sociale (PREFAS) – en tant que prestataire – ont été partenaires d’un programme, financé par l’Agence Nationale de la Recherche, sur les inégalités éducatives et la construction des parcours des 11-15 ans dans leurs espaces de vie (acronyme INEDUC) [1]. Une telle combinaison de partenaires, en grande partie inédite, posait l’enjeu d’une véritable collaboration scientifique, afin d’éviter la fragmentation des analyses selon les thématiques, les disciplines, les sites institutionnels, voire selon chacun des chercheurs concernés, ou alors l’imposition d’un leadership non négocié. L’état de l’art préalable à la soumission du projet a ainsi été complété par un glossaire dans lequel chacun pouvait retrouver son fil directeur à chaque moment de l’immersion dans le travail de terrain.
Le glossaire relatif à la recherche INEDUC a vu le jour après une année de travail collectif [2]. Les notions et les concepts qui suivent ont été définis : Adolescent, Contexte, Éducation, Empowerment, Environnement numérique, Inégalités, Institutions scolaires, Justice spatiale, Loisirs, Mobilité/Déplacement, Orientation, Parcours, Politiques scolaires / Politiques éducatives, Pratique, Projet (d’orientation), Ressources, Réussite (scolaire/éducative), Socialisation, Stratégies familiales d’éducation, Temps libre, Usage.
Une fois le programme « Inégalités éducatives et la construction des parcours des 11-15 ans dans leurs espaces de vie » terminé (en 2015), une partie de l’équipe [3] a décidé de réactualiser cinq définitions (Empowerment [4], Inégalités [5], Loisirs [6], Mobilité [7] et Usage [8]) et de réinterroger la pertinence de cet outil « glossaire » dans le dispositif méthodologique de la recherche.
Définition :
La notion de justice spatiale est associée à l’objectif de réduction des inégalités et de toutes les formes de discrimination, notamment par la promotion de politiques d’équilibre territorial. Pour autant, l’égalisation des conditions d’existence des individus et des groupes sociaux renvoie à la tension permanente, qui traverse les sociétés démocratiques contemporaines, liée à la difficulté de prendre en compte dans sa globalité la diversité au sein des sociétés et des espaces.
Pour prétendre réduire les inégalités spatiales, il faut donc agir sur l’ensemble des distances qui éloignent les individus les uns des autres. Le poids des déterminants sociaux et des contraintes structurelles dans la production des inégalités sociales implique une action politique sur l’origine même des injustices, et non pas uniquement sur la distribution des ressources, des services et des équipements. Ce n’est pas l’espace ou le territoire qui produit des inégalités, mais bien les acteurs sociaux et la nature des rapports qu’ils entretiennent.
En effet, les modalités d’accès d’un service ou d’une activité relèvent de configurations sociales et spatiales différentes, concrètes ou subjectives, d’adaptation à des contextes. Ces différentes dimensions constituent les fondements inséparables de toute politique visant à réduire les inégalités sociales. « Les différences dans la capacité à se saisir d’une offre ou à surmonter une absence d’offre de service, ou encore à imaginer de nouvelles formes de pratiques sont une réalité dont il faut tenir compte dans la définition de politiques justes » (Séchet, David et Keerle 2013, p. 75). Pour garantir une plus grande justice spatiale, la construction des politiques de régulation doit obligatoirement articuler la résorption des inégalités spatiales et la réduction des inégalités sociales.
Cette notion de justice spatiale trouve notamment ses origines parmi les préoccupations environnementalistes et de spatial equity, égalementparmi les travaux sur la criminalité dans les quartiers défavorisés développés dans la littérature anglo-saxonne, mais aussi dans certains travaux plus anciens sur la ville (Harvey 1973).