Les dynamiques sociales, économiques, politiques et spatiales des communautés occupent une place prépondérante pour expliquer les transformations des phénomènes et processus contemporains à la charnière entre l’individu et la société. Qu’il s’agisse du vote communautaire, des associations ou réseaux sociaux ethniques, de l’organisation sociale dans les quartiers pauvres de grandes villes, d’un espace local de l’organisation spatiale, de l’intégration des immigrés à la société française ou de tout un éventail de pratiques religieuses, culturelles ou de travail, individuelles ou collectives, le terme de communauté continue d’être utilisé et marque une présence accrue.
La communauté, concept transversal en sciences humaines et sociales, resurgit également dans de nombreux domaines de recherche. La sociologie urbaine française s’est intéressée aux parallèles et complémentarités entre la communauté comme espace social et à l’organisation urbaine et économique locale (Bacqué 2006, Donzelot 2003) et dans une perspective transatlantique. Ce concept a donné une autre perspective à l’étude des groupes professionnels pour repenser les identités et les métiers au travail (Demazière & Gadéa 2010). Les études sur la religion ont interrogé l’aspect communautaire des groupes confessionnels sous l’angle de la production de l’altérité, de l’organisation spatiale des communautés et des dynamiques des relations inter- et intragroupes (Endelstein, Fath & Mathieu 2010, Lamine, Lautman & Mathieu 2008). Certains travaux récents sur l’immigration attirent notre attention sur des effets de communauté à l’égard de l’intégration des immigrés (Armangague 2010, Safi 2006), d’autres observent des dynamiques communautaires au sein des quartiers défavorisés (Kepel 2011, Lagrange 2010, Lapeyronnie 2008).
Les sciences politiques ont analysé les relations de groupes sociaux minoritaires et l’État. Elles se sont intéressées à la manière dont des minorités se constituent en forces sociales et politiques cherchant à participer à la vie publique. La régulation publique du fait minoritaire, notamment religieux, a été étudiée en prenant pour objet les relations entre l’Etat et les porte-paroles des communautés confessionnelles. Dans le contexte français qui marginaliserait les « mobilisations sur un mode identitaire » (Escaffré-Dublet et Simon 2009), certains auteurs s’interrogent sur les usages de la notion de communautarisme et sur les effets de disqualification des tentatives de participation à la vie sociale et politique qu’implique ce terme dans le cas français (Berlorgey et. al 2005). D’autres travaux posent la question sur la possibilité d’un modèle républicain multiculturel sensible à des identifications collectives (Guérard de Latour 2009, Laborde 2001). En outre, une publication récente a été entièrement dédiée à la réitération des recherches en sciences sociales sur “faire communauté en société” (Sainsaulieu, Salzbrunn & Amiotte-Suchet 2010).
Ces journées d’étude souhaitent étayer l’étude des dynamiques communautaires et en améliorer le caractère systématique et comparé. Quelles ressources et inégalités sont transmises à travers les relations communautaires et par l’intermédiaire de quels mécanismes ? Comment participent-elles la régulation externe et interne à la formation des dynamiques communautaires ? De quelles manières ces dynamiques opèrent-elles un “effet communautaire”?
Nous attendons des travaux originaux représentant des disciplines et des traditions différentes en sciences sociales. Nous cherchons aussi bien des travaux qui empruntent des méthodes quantitatives pour mesurer des effets de communauté que des travaux plus ethnographiques qui cherchent à étudier les mécanismes de tels effets dans un contexte spécifique. Un parallèle analytique entre les effets de quartier et de communauté pourrait-il nourrir nos réflexions ? Si les effets de quartier ont leur origine dans la distribution spatiale des individus, quel serait le fondement des effets de communauté ? Comment ces approches délimitent-elles leurs objets d’étude ?
Une approche intermédiaire pourrait consister en l’analyse des processus ou des mécanismes sociaux, sensible à l’action en train de se faire et ouverte à des outils méthodologiques et des niveaux d’analyse différents. Quelque soit l’approche méthodologique et le terrain d’enquête, nous souhaitons accueillir des contributions sur des processus institutionnels, politiques, économiques ou spatiaux, mais aussi sur des aspects moins développés tels que culturels, relationnels ou émotionnels.
Trois axes thématiques sont proposés pour guider ce travail collectif :
- Ressources : Quelles ressources les communautés mettent-elles à disposition de leurs membres? Quelle est la nature de ces ressources et de l’accès à ces dernières? Sous quelles formes et de quelles manières sont-elles distribuées parmi les membres individuels?
- Régulations : Qui exercent le contrôle sur les communautés? De quelle manière un contrôle par le haut participe-t-il à la production et à la régulation des effets communautaires? Quelle est la marge de manœuvre des mobilisations et des pouvoirs d’en bas? Par quels moyens la régulation s’applique-t-elle au sein des communautés? Et quelles en sont les conséquences?
- Inégalités : L’accès aux dynamiques et ressources communautaires est-il inégal? Dans ce cas produit-il de la vulnérabilité d’un côté, et de la résilience de l’autre, par rapport à des effets communautaires? Quel est le rapport des dynamiques communautaires aux inégalités sociales? En sont-elles un vecteur ou au contraire, fournissent-elles une protection contre ces inégalités ?
Modalités de soumission des propositions et calendrier.
Les contributions peuvent s’inscrivent d’une manière plus ou moins libre aux trois axes proposés. Elles feront l’objet lors des journées d’étude d’une présentation orale de 20 minutes maximum. D’une longueur maximum de 3000 signes (espaces compris), les propositions de contributions seront accompagnées d’une courte présentation de l’auteur (nom, prénom, statut, institution de rattachement, coordonnées), d’un titre provisoire et des mots clés.
Les propositions de contributions sont à adresser avant le 22 mars 2013 au comité d’organisation :
- Linda Haapajärvi (EHESS, CMH-ERIS),
- Samina Mesgarzadeh (EHESS, CMH-ETT)
- et Thomas Watkin (EHESS, CMH-PRO)
Les décisions du comité scientifique seront communiquées aux auteurs le 15 avril 2013.
Les journées se dérouleront les 19 et 20 juin 2013, à École des hautes études en sciences sociales, 190 avenue de France, 75013 Paris.
Suite à la journée d’étude les contributions pourront faire l’objet d’actes et de publications.
Comité scientifique
- Marie-Hélène Bacqué (Université Paris Ouest Nanterre La Défense, Mosaïques),
- Sébastien Chauvin (University of Amsterdam)
- Lucine Endelstein (Université de Toulouse 2, LISST),
- Sophie Guérard de Latour (Université Paris 1),
- Camille Hamidi (Université Lumière Lyon 2, Triangle),
- Mirna Safi (IEP Paris, OCS),
- Patrick Simon (INED, IEP Paris)