Un cartogramme est une carte* dont le fond de carte n’a pas été construit en utilisant les variables de distance*, d’angles ou de surface mesurées sur l’espace* à représenter. Tout en respectant les paramètres topologiques* de l’espace de référence, le cartogramme donne aux unités spatiales de la carte des valeurs de surface conforme à une ou plusieurs autres séries de variables.
Les cartogrammes constituent un type particulier d’anamorphose. Contrairement aux cartogrammes, les anamorphoses thématiques ne portent pas sur le fond mais sur le thème de la carte. Elles supposent que le lecteur va mentalement comparer cette carte avec une carte à fond euclidien. Par ailleurs, elles ne sont pas comparables à d’autres cartogrammes, puisque le comparatisme en cartographie suppose justement l’existence d’un fond de référence commun. C’est pourquoi ce type d’anamorphose n’a de valeur qu’anecdotique.
Le cartogramme est une idée ancienne, plus ancienne que la cartographie mathématique et géodésique. On peut citer la carte byzantine qui couvre le pavement de l’église de Madaba ( Jordanie) et qui donne plus de place aux lieux habités ou symboliquement forts qu’aux autres. L’anamorphose a été inventé ou réinventée par la peinture de la Renaissance presque en même temps que la perspective, tandis que, en cartographie, elle a longtemps semblé en contradiction avec le projet d’une représentation exacte de l’espace de référence. Même si la démarche qui fonde le cartogramme n’a jamais complètement disparu du monde de la cartographie, il faut attendre les années 1960 pour en observer un renouveau significatif. Dans le prolongement de sa propre thèse de doctorat, soutenue en 1961, Waldo Tobler a su donner une légitimité mathématique au procédé. Plusieurs algorithmes ont alors été créés par la suite et de nombreux cartogrammes ont été réalisés. Le cartogramme est une composante du langage cartographique désormais bien acceptée, sauf par les courants les plus conservateurs de la corporation cartographique. Sa sémiologie ne pose guère de problèmes de lisibilité au grand public. Les cartogrammes les plus courants utilisent des variables de masse transformées sur la carte en valeurs de surface. Ce n’est pas la seule solution possible et on peut imaginer d’autres types de correspondances entre séries de variables décrivant l’espace de référence et caractéristiques géométriques de la carte. L’analogie territoriale ou réticulaire entre le « terrain » et la carte n’est pas non plus obligatoire et on peut imaginer des relations croisées réseau > surface ou territoire > graphe. Enfin, le fond de carte peut être le résultat d’une analyse multivariée comme dans le cas du Multi- Dimensional Scaling (MDS).